Inutile de faire des recherches poussées pour le constater, cette année encore le Tour des Flandres (De Ronde) a fait une incursion en Wallonie... et pas n'importe où en Wallonie, à Ellezelles !
Bruges et le Saint Sang (on verra plus bas la raison de cette illustration)
Quand ils descendent à fond les ballons du Berg Ten Houte (Montagne en bois, traduction Google) pour déferler en forts groupes compacts vers le Kanarieberg (Mont du Canari, traduction personnelle), les coursiers hirsutes maculés de la boue grasse des plaines flandriennes, déjà inquiets d'avoir une dernière fois à grimper le Vieux Quaremont avant l'arrivée libératrice à Oudenaarde, le jarret dur entrent en pays francophone pour une (très) courte pause musculaire...
Pour Karel Van Wijnendaele, créateur du Ronde, le cyclisme devait participer à l’émancipation du peuple flamand. Il s’employa dès lors à développer le cyclisme en Flandres... comment imaginer alors telle irruption linguistique traîtreuse sans y voir une agression ouverte vers la cheville ouvrière de la chasse réservée des flandriens ?
La flèche indique les quelques hectomètres parcourus en Flandre impériale
Inutile de compter sur les commentateurs sportifs pour éduquer le cher téléspectateur...
Mais pour les aficionados de l'affaire de Cambron, ce raid vélocipédique transfrontalier ne vient pas de nulle part, et bien sûr on va reparler de la Flandre impériale...
Quatrain IX : 18
"Le lys Dauffois portera dans Nancy,
Jusques en Flandres electeur de l'Empire
Neufve obturee au grand Montmorency,
Hors lieux provez delivre a clere peyne."
La Terre des Débats (Land von Debat)
Durant le Moyen Âge et le Saint Empire, la Terre des Débats était un territoire qui s'étendait sur les seigneuries de Lessines et de Flobecq (qui comprenaient la ville de Lessines ainsi que les villages de Bois-de-Lessines, Ellezelles, Flobecq, Ogy, Papignies et Wodecq). Cette région fut l'objet de luttes incessantes entre les comtes de Hainaut et de Flandre durant une période s'étalant du XIII e au XVIII e siècle.
Nous n'allons pas reprendre la démonstration de Rudy Cambier concernant le quatrain donné plus haut (La famille de Montmorency était propriétaire d'un fief en Flandre Impériale au 13 ième siècle, parce qu'à l'époque pour participer à l'élection de l'Empereur du Saint Empire, il fallait posséder des terres en Empire...) mais se demandait Rudy, comment 250 ans après ces faits, alors que l'on n’élit plus l'Empereur depuis longtemps, un provençal pourrait connaître cette anecdote, il en déduisait avec raison, que seul un contemporain et un habitant de la Région pouvait savoir cette historiette...
En fait, il semble que la famille de Montmorency possédait deux fiefs dans la région :
Le premier à Ellezelles, entre la Place à l'Aulnoit et le Séméni, le château d’Hubertmont : En 1248, son petit-fils Jean sire de Pamele, baron d’Audenarde, seigneur d’Ellezelles et d’Hubermont possède tous ces biens renseignés comme propriété de la famille de Montmorency. Celle-ci disparaît avec la mort cruelle de Philippe de Montmorency, comte de Hornes, décapité avec le comte d’Egmont sur l’ordre du duc d’Albe en 1568.
Et aussi, selon la mairie d'Amougies : Ce village du Hainaut appartenait aux seigneurs de Montmorency , qui y possédaient un château près de la rivière la Ronne. Amougies formait, avec Russeignies, un fief de la seigneurie de Renaix. À la fin du XIII ème siècle, elle était aux mains de Jean, sire d'Audenarde, qui déclarait la tenir de Guy de Dampierre, comte de Flandre; elle passe ensuite aux Montmorency et reste dans cette famille jusqu'à la fin de l'Ancien Régime.
C'est moi le preum's !
La maison de Montmorency est une famille de la noblesse française. Entrée en possession à la fin du X e siècle de la ville de Montmorency. Elle est apparentée aux grands lignages féodaux et par eux aux Carolingiens et aux premiers rois capétiens. La maison de Montmorency a donné à la France six connétables, douze maréchaux, quatre amiraux, un cardinal de l’Église catholique, un vice-roi de Nouvelle-France, des pairs de France, des gouverneurs et d'autres personnalités du XI e au XIX e siècle.
C’est du sang bleu, garanti pur Lys de France !
Cette famille est tellement certaine de sa primauté sur les autres qu'elle a choisi, modestement, pour devise : "Dieu aide au premier baron chrétien" signifiant par là, qu'après Clovis, le premier baron chrétien fut un Montmorency... de là peut être leur ambition de postuler au titre d'Empereur...
Mais cette revendication de proximité avec le Mérovingien est battue en brèche par une autre grande famille de France, toujours de la région parisienne, la maison de Lévis qui affirme dans sa devise : "Dieu aide au second chrétien Lévis"
Comme la plupart des grandes maisons d'Île-de-France, les Lévis faisaient remonter leurs origines mythiques jusqu'à un compagnon de Clovis. Ils rivalisaient avec les Montmorency pour l'honneur d'avoir eu leur ancêtre baptisé par Saint Rémi juste après Clovis, d'où la devise : « Dieu aide au second chrétien Lévis » (avec la rime Clovis-Lévis).
Les Lévis, jouant sur l'homonymie de leur nom avec la tribu de Lévi, disait lorsqu'ils priaient : "Je vous salue Marie, ma cousine, pleine de grâces..."
Le Da Vinci code est basé sur cette théorie, une dynastie issue des mérovingiens et de la famille de Jésus serait toujours en vie, cachée et protégée par, dans un premier temps, les Templiers, puis après 1312 par le Prieuré de Sion, volet secret de l'Ordre du Temple !
Si donc les Montmorency affirmaient être issus du premier baron chrétien, les Lévis, matois, assuraient, eux, descendre du deuxième chrétien ! Ce qui fait des Lévis les seconds chrétiens du royaume alors que les Montmorency ne seront jamais que les premiers des barons chrétiens… et Dieu sait combien d’hommes qui n’étaient pas barons devinrent chrétiens dans les jours qui suivirent le baptême de Clovis ?
Le blason des Lévis que l'on retrouvera bientôt
Cette proximité, réelle, légendaire ou héréditaire, d’avec les premières races royales est une permanence dans toutes les familles médiévales, ainsi ces deux familles "parisiennes" qui se disputent par armes et devises interposées, pour être déclarées proches du mérovingien…
Retour de Blason
D'où vient le blason de la maison Lévis, le premier chrétien après Clovis ?
Du Hainaut ! Nous allons voir pourquoi ?
Parce que ceux qui n'ont pas top de difficultés à prouver leur origine franque et "mérovingienne" sont bien entendu les barons hennuyers, descendants naturels des premiers compagnons du tournaisien Clovis.
Ainsi Vincent de Soignies, donné comme premier comte de Hainaut (certain préfèrent dire premier "comte en Hainaut") qui affirme être encore plus mérovingien que les plus légitimes puisqu'il atteste descendre d'Albéric, le frère de Mérovée prendra ce blason chevronné.
Le blason de Vincent de Soignies ou Madelgaire de Famars de Hainaut , deviendra le premier blason du Hainaut, connu maintenant sous le nom de Hainaut ancien...
Les premières armoiries du Hainaut apparaissent au XII e siècle, elles se blasonnent : d’or à trois chevrons de sable. Avec le mariage de Baudouin V de Hainaut à la fille du comte de Flandre Marguerite d'Alsace qui hérite du comté en 1191, la Flandre et le Hainaut sont unis et Baudouin V, devenu également comte de Flandre adopte les armoiries de ce comté en lieu et place des anciennes armoiries du Hainaut.
L'historien Jacques de Guyse, s'il déplore l'abandon de l'ancien blason, lui donne une origine légendaire extraordinaire et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle est surprenante. Il fait remonter la création de ce blason à l'époque de Brunehulde donné comme constructeur des Chaussées Brunehaut et petit fils de Bavo, le fondateur de Bavai descendant de la famille de Priam qui a quitté Troie après la, ruine de la Cité.
Le texte de Jacques de Guyse :
« Brunehulde serait aussi l'inventeur - chez les Belges - du motif des chevrons qu'il aurait fait peindre sur les étendards, les écus et les boucliers, sur les pavillons et les tentes, sur les armures et les armes et les armoiries particulières à la ville et au royaume.
(Ces armes) consistaient « en sept chevrons ou toits, dont quatre d'or, et trois noirs ou terreux. Quoiqu'on n'en distingue que six au premier aspect, il est néanmoins composé de quatre chevrons entiers et de trois imparfaits, savoir d'un noir qui est imparfait, et de deux pièces d'or en éminence, qui marquent deux chevrons imparfaits, quoiqu'elles semblent d'abord n'en marquer qu'un seul ; parce que ces deux parties supérieures de l'écu ne sont pas conjointes l'une à l'autre ».
« Brunéhulde parait avoir choisi ces armoiries par allusion aux sept grandes routes de la ville de Bavai, qui étaient recouvertes par des toits, ainsi que nous l'avons dit plus haut, et dont quatre seulement demeurèrent entières et dans la perfection qu'il leur avait donnée, aussi longtemps que le pays resta habitable Sous domination Belge. Quand aux trois autres routes, elles demeurèrent imparfaites et n'eurent que peu d'étendue, à cause du voisinage destructeur de l'Océan... »
Les armoiries particulières aux princes du pays, qui se nomme aujourd'hui le Hainaut, furent sans aucun doute portées publiquement depuis le temps de Brunéhulde... et ainsi elles ont subsisté pendant deux mille quatre cents ans. En effet depuis David roi d'Israël, sous lequel régnait Brunéhulde, jusqu'à J.C, on compte onze cent quatre années, et depuis l'incarnation de notre Seigneur jusqu'à la mort de ce Jean, comte de Hainaut, ou du moins jusqu'au temps où, renonçant aux armes de Brunéhulde, il prit pour armoiries un écu d'or avec quatre lions, dont deux de sable et deux de gueules posés en treillis, il s'est écoulé treize cens ans environ, qui ajoutés avec 1104, donnent deux mille quatre cent quatre années. »
Ce n’est pas le thème de cet article, mais Jacques de Guyse écrivait l’Histoire du Hainaut à la demande du Comte, certes nous ne sommes encore qu’au Moyen âge, certes le Comte en cette période est appelé Guillaume l'Insensé... mais il y a des limites à l’exagération, prétendre que le blason du Hainaut remonte au roi David et que ses chevrons symbolisent les Chaussées Brunehaut que l’on croyait à l’époque construites par une reine neustrienne, aidée en cela par le diable, n’a pas de sens, et c’est pour cela que le livre de Jacques de Guyse doit être lu avec attention et surtout ne pas être pris au premier degré… (Jacques de Guyse est né une dizaine d'années après la mort d’Yves de Lessines)
Revenons à nos blasons…
Jacques de Guyse affirme que l’Archidruide Brunehulde, qui gouvernait les Belges de sa capitale de Bavai, pour mieux contrôler son royaume fit construire sept Chaussées qui, partant de Bavai rejoignait les limites de son royaume. A chacune des Chaussées, le roi avait attribué une couleur, un métal alchimique et une divinité (voir carte). Chacune de ces routes était orientée selon un azimut précis qui a été étudié par le professeur Desailly. Et ces routes, structure sociale, religieuse et économique du royaume étaient représentées sur son Blason…
L'espace dégagé par les extrémités des Chaussées Brunehaut représente, à peu près, les territoires occupés par les Francs saliens avant les conquêtes de Clovis, cet espace deviendra par la suite l'Austrasie...
Brunehulde demande également aux nobles de son royaume d’entretenir les chaussées et de se choisir des blasons chevronnés en rapport avec la couleur de la route de laquelle ils sont proches… Ainsi la ville de Soignies, proche de la Chaussée associée à la couleur verte qui se dirige vers Cologne :
Mais et c’est à noter, le blason Hainaut Ancien a été concervé par certaines entités, malgré le changement opéré par la maison ducale au début du quatorzième siècle, ainsi par exemple Coulsore, Colleret sur la Chaussée de Trèves qui ont conservé le blason d’origine :
Ces deux communes sont liées dès leur origine à la famille de Vincent de Soignies, il n'est donc pas anormal que l’on retrouve son blason dans ces deux localités situées sur une Chaussée Brunehaut…
On le sait, on en a parlé plus haut, Vincent de Soignies est celui qui donne à la famille de Hainaut sa légitimité dynastique (Quand il a fallu choisir un Empereur à Byzance, pour réunifier l’antique empire romain on décide de nommer un membre de cette famille, c’est tout sauf un hasard!). Vincent est tellement proche de la famille de Clovis, que la famille de Lévis qui se prétend être issue de la deuxième personne à s’être faite baptiser choisit également la blason de Hainaut pour emblème, façon d’affirmer sa proximité avec les origines royales française…
Le village de Lévis (actuellement Lévis saint Nom) est proche de Voisins le Bretonneux, de Vaux de Cernay, de Monfort L’Amaury… bref, des villages de ceux qui menèrent la croisade contre les cathares, dite croisade des Albigeois… Toutes ces familles se taillèrent des fiefs en Occitanie, où ils s’installèrent, prospérèrent pour y vivre toujours…
Les Lévis sont devenus, les Lévis Mirepoix en Ariège, les Voisins ont laissé leur fief de Rennes le Château dans l'Aude à la famille de Hautpoul Blanchefort...
Les Lévis au blason de Hainaut, se virent attribuer le fief sacré de Montségur ! Montségur où dit-on les Cathares cachaient le Graal ! Où les Nazis le cherchèrent parait-il à la demande d’Himmler !
Les relations du Graal et du Catharisme sont récentes, elles viennent des néo cathares qui à la suite de Gadal, René Nelli et Déodat Roché affirmèrent que les Parfaits seraient détenteurs du vase sacré...
Sans non plus entrer dans ce débat (à entendre les néos cathares, le monde entier serait enterré là bas, tous les trésors du monde y seraient cachés…), il est à remarquer que les cathares ne donnaient absolument aucun caractère divin à la personne de Jésus, ils ne reconnaissaient pas le sacrement de l’eucharistie plus encore ils abhorraient les reliques ! On se demande vraiment ce que le Graal aurait fait là bas ! Je répète, dans l’histoire des Cathares on ne parle jamais du Graal, sauf depuis la renaissance des mouvements néo cathares !
Par contre, le Graal est un élément capital du légendaire hennuyer (et plus largement austrasien), qu’on en juge (rapidement) : C’est Chrétien de Troyes qui évoque le premier le Graal, à la demande du Comte de Flandres, toutes les continuations du Graal sont issues de la littérature picarde, le Saint Sang de Bruges est amené dans notre région en 1204 (c’est la légende qui l’attribue à Thierry de Flandre) alors que Baudouin de Hainaut est Empereur de Byzance et se fait le convoyeur de toutes les reliques de la chrétienté !
Ne serait-ce donc pas parce que les Lévis avaient « hérité » de Montségur que l’on a logé le vase sacré dans cette région ? Et que le blason, symbolisant l’histoire légendaire du Hainaut, ne marquait que le cheminement de cette ultime relique ?
Rudy Cambier n’affirme-t-il pas que le texte écrit à Cambron nous donne la localisation du Graal ? Yves de Lessines aurait alors eu l’information et nous l’aurait passée par l’intermédiaire de son texte énigmatique !
Et d’ailleurs quel est le, blason de l’abbé qui a pris la suite d’Yves de Lessines à l’abbaye de Cambron !
Retour de blason !
Le blason Hainaut Ancien, qui date du Roi David est-il marqueur de la piste à suivre...
Prochain article : Les reliques sanguines, les chaussées Brunehaut et le Graal dans l'œuvre d'Yves de Lessines...
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